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Pourquoi dire « Juifs Noirs » ?

Nombreux sont ceux qui posent cette question sur le nom officiel de notre association.
En fait, cette question peut s’appliquer aux deux termes que nous avons joint en une seule idée dans cette appellation.
La même réponse existe pour ces deux termes, Juifs et Noirs: c’est que c’est ainsi, que ces communautés ont choisi de se nommer.
Malgré le fait que chacun de ces deux qualificatifs furent d’abord utilisés dans leur histoire, à des fins discriminatoires, ils devinrent éventuellement appropriés par ceux qui étaient visés par la discrimination.
Le terme Juif apparaît dans le Livre d’Esther pour nommer tous les Israélites, dans un contexte où ceci représente une population exilée et persécutée.
Le nom d’enfants d’Israël était d’abord utilisé pour dénoter la noblesse et l’indépendance de la même communauté, les distinguant en tribus distinctes.
Mais plus tard ce sont les Israélites eux même qui choisirent d’adopter l’appellation de Juifs, s’appropriant ainsi un terme qui était utilisé par leurs ennemis.
La même chose s’applique au mot Noir. Les Africains qui furent mis sous cette coupole dénominative ne s’appelaient pas eux même des Noirs. De manière évidente ils se nommaient selon leurs différentes nations, langues, ou pays.
Le mot Noir était utilisé par ceux qui ne connaissaient pas les différences entre les Africains. Comme le mot Juif, Noir est un terme inscrit dans un rapport de violence historique contre la population Africaine.
Sur l’étoile jaune, les nazis ne pouvaient pas écrire « Enfant d’Israël ».
Dans les discours anti-Noirs, les racistes ne peuvent pas nommer les populations africaines spécifiques.
Les racistes généralisent.
C’est cette généralisation qui crée des groupements linguistiques ou sémantiques, utilisés par les persécutés. Aujourd’hui cette même discussion est vivante aux USA, concernant l’utilisation du mot « Nègre ». C’est un mot utilisé à la fois par les racistes contre les Noirs, et par les Noirs américains comme terme de fraternité avec les leurs.
C’est la souffrance partagée qui a fait que les Juifs se nomment entre eux par le terme que leur ont donné leurs ennemis.
C’est la même chose pour le qualificatif Noir.
Éventuellement, ceci revient à un choix historique que fait toute une communauté, d’intégrer tous ceux qui sont visés par la même persécution, de fonder une famille basée sur le partage d’une expérience commune.
Ceci donne la chance à ces communautés de changer la connotation négative, de prouver son contraire, et la transformer en une source de force et de fierté.
Etre Juif ou Noir, ou bien Juif et Noir, revient à une condition sociale, dans un cadre né d’un déséquilibre historique, qui a fournit des expériences de persécutions et de réductionnisme des cultures étrangères.
Ce sont des termes qui ont été réclamés et ré appropriés par les victimes pour changer leur charge négative et établir une communauté
d’expérience.
Donc n’ayant ni la honte d’être Juifs, ni celle d’être Noirs, nous avons choisi de nommer cette association selon ce que le gens se nomment eux-mêmes.
C’est l’histoire qui fait qu’on ne peut s’empêcher de sentir la souffrance implicite dans ces qualificatifs qui ont trop souvent signifié l’humiliation.
Mais ils sont devenus pour ceux qui les portent fièrement des termes associés à la joie et au bonheur d’être soi-même, naturellement, même parmi les imbéciles qui sont menacés par l’existence de l’autre.
L’essentiel c’est de reprendre volontairement la parole, le mot, et lui donner le sens choisi en toute liberté de signifier ce que nous voulons, pour qu’il nous fasse ressentir ce que nous voulons ressentir, et non pas ce qui nous est imposé par ceux qui cherchent à nous faire souffrir en utilisant ces mêmes mots.

1 Comment
  1. Bonjour Monsieur Gershon Nduwa,

    Merci pour cet édito.
    Il me faudra le relire pour que je puisse analyser, intégrer ce qui m’y interpelle.
    Je ressent qu’il y a beaucoup à prendre pour un vieux juif achkenaze.
    Avec mes meilleures salutations
    Hubert Benkoski

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