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L’identité comme « race » en France

L’une des caractéristiques les mieux partagées des histoires du racisme consiste à partir
d’une définition surdéterminée appelée le problème de l’altérité.
Proposer une étude de l’histoire de l’idée de race en France revient à se promener dans un champ de mines.
Beaucoup voudraient nier la possibilité d’appliquer ce concept à l’expérience française, voire sa validité même,
si bien qu’on ne peut adopter a priori aucun accord sur les termes et les concepts. En même temps,
la question des différences raciales est devenue centrale dans la vie publique française pendant le
dernier quart du siècle, prenant ainsi un caractère d’urgence politique. Il est récemment devenu
quelque peu un truisme que de constater que les chercheurs français ont tendance à reculer devant
les considérations raciales dans la vie nationale. Bien des raisons ont été avancées pour expliquer ce fait,
y compris la croyance mythique dans l’incapacité française à voir la différence de couleur, l’accent mis
sur la classe comme lieu de séparation sociale et politique et, facteur le plus important, la tradition
d’universalisme républicain. À la différence des chercheurs anglais, allemands et surtout américains
contre l’expérience desquels les débats sur l’idée de race sont si souvent opposés,
leurs collègues français ont semblé curieusement muets sur cette question.
Ce n’est peut-être pas tant l’usage du mot qui est problématique, mais l’absence d’explications
contextualisées et de prudence face à l’histoire politique de ce mot. L’argument de la race a
servi à légitimer des violences telles que le racisme, la discrimination, la ségrégation, l’oppression
et l’extermination de certaines populations. C’est pourquoi la France républicaine,
fière de ses valeurs d’égalité et de liberté, condamne toute référence aux catégorisations ethno-raciales.
Il existe donc une réelle difficulté à nommer les groupes minoritaires stigmatisés et discriminés racialement.
Liée à une reconnaissance du citoyen français comme catégorie abstraite et historique,
la France est prise dans la posture qui consiste à être aveugle aux différences raciales,
et donc dans l’impossibilité de dire la race du fait du bannissement que subit le mot.
Cette logique est constitutive du pacte républicain et universaliste.

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