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Chez soi et neo-colonialisme

Aujourd’hui, nombreux sont celles et ceux qui s’interrogent, pour savoir si nous sommes en train de voir la majorité de la société occidentale devenir soumise à un contexte comparable à celui de la loi coloniale. Malgré la nécessité de faire des nuances, pour ne pas en venir à dire ‘mon jour est pire que ta nuit’, il y a dans ce questionnement une exigence éthique qui mérite d’être adressée. Pour expliquer cette comparaison, les gens qui en parlent font fréquemment référence à un parallèle basé sur la puissance des corporations internationales. Celles-ci, en Europe aujourd’hui comme autrefois et encore en Afrique, font lobby auprès des gouvernements pour favoriser l’instauration de lois sociales, mettant leurs produits et leurs profits en priorité. Comme pour les pays du Tiers-Monde, ces corporations exercent leur influence sur la classe politique des pays ciblés, et obtiennent que les populations soient habituées à des régimes de consommation, et de discipline forcée, qui empiètent fréquemment leur libertés constitutionnelles sous couvert “d’urgence nationale”. En effet, ce genre de scénario est typique, pour ceux qui ont subi la ségrégation coloniale. Or ce schéma n’est pas une occurrence, c’est établi suivant un modèle. Il est possible de confirmer que les africains ont une une longueur d’avance dans le sujet.
L’apartheid d’Afrique du Sud, n’était pas là pour être un cas unique.
La colonisation est une expérimentation sociale faite chez les autres, qu’on ramène, et dont on applique les leçons, chez soi. C’est pour cela, qu’en nos temps plus que jamais, parler de la colonisation est nécessaire. Non pas comme certains voudraient le faire croire, pour ramener un vieux sujet ne concernant plus personne, mais parce qu’en étudiant la colonisation, on s’informe des dérives de la gouvernance, on peut reconnaître les stratégies classiques de l’instauration des tyrannies, et aussi savoir ne pas faire des amalgames insensibles, qui réduisent par leur comparaison la souffrance de l’autre.
Le monde a vu pire. L’esclavage et la Shoah ne sont pas utilisables pour gonfler notre ego avec des discours victimaires. Toutefois, il est correct de parvenir à la conclusion évidente, que ceux qui ont établi et participé à l’aventure des colonies, traitent éventuellement leurs propres compatriotes avec la brutalité apprise dans les espaces colonisés. Comment pourrait-il en être autrement? Les naïfs qui pensent que ces gens ont des vertus humaines qui apparaissent soudainement quand ils sont dans un autre paysage, se leurrent profondément. Vivre en Argentine n’a pas changé les nazis allemands en humanitaires. Au contraire, ils y ont ouvertement organisé des tortures et des persécutions de masse. Partout où l’idéologie coloniale ou sa justification se trouve, il existe une pensée de différencier, de catégoriser, et d’opprimer. Ceci pour le profit, mais avec des prétextes ethniques, religieux, ou culturels tels que la ´démocratie ´ sous prisme de consumérisme.
Entre le genocide des Hereros de la Namibie et les camps de concentration allemands de la Seconde Guerre Mondiale, il n’y avait qu’un pas, tragiquement celui de l’importation d’une technique d’élimination en masse des êtres humains.
La question criante, pour ceux qui ont subi les outrages inhumains des genocides de la colonisation est, comment peut-on, non seulement oublier, mais aussi redonner les rênes à une classe qui n’exprime ni remords, ni regrets vraiment crédibles, car elle continue d’exploiter cyniquement les resources naturelles et humaines des ex-colonies? En somme, comment est-il possible de s’imaginer qu’ils vont se comporter différemment chez eux?
Les éberlués, qui cherchent la porte de sortie et ne s’y retrouvent plus dans le labyrinthe des responsabilités, sont souvent ceux qui croyaient que le feu de la maison du voisin n’arriverait certainement pas à leurs portes. Les africains quant à eux n’ont jamais lâché du regard les genocidaires à répétition. Même quand ceux-ci viennent habillés en cravate de manager de corporations commerciales.
Les africains n’ont pas peur, ils ont la foi. Ils savent que le fouet, le fusil, ou l’arme nucléaire, résultent finalement pour ceux qui les utilisent afin de dominer les autres, en outils de suicide tournés vers soi. La chute de l’Empire Romain, avec toute sa stature, nous offre un exemple éloquent, de la déchéance d’une civilisation cannibalisée de l’intérieur par son obsession avec la conquête. Le prophète Isaie dit : « ..Un peuple ne lèvera plus d’arme contre un autre peuple, et l’on cessera d’étudier la guerre… ». Les cerveaux qui ont trop pensé et trop fait la guerre, finissent par la voir partout. Ils répondent à leurs propres problèmes par la brutalité. Appliquer les méthodes du champ de bataille dans la vie civile, est une erreur qui laisse des blessures traumatiques dans l’histoire d’une nation. Hillel notre Sage a dit: “Mai deAlakh Sani, lir’outakh al taabid. Ce qui t’est détestable, ne le fais pas à ton prochain.”
Toutes les questions sont légitimes au sujet de la liberté et de l’oppression. Dans notre sujet, ces interrogations prouvent qu’il est devenu impossible de saisir et de résoudre les problèmes sociaux à l’intérieur de l’Europe, sans adresser les méthodologies utilisées pendant la colonisation. Car il s’agit d’un schéma social fait pour être reproduit.
Pour les penseurs qui ne craignent pas de connecter les points, et qui ont compris que l’interdépendance planétaire est une réalité, il est clair que c’est en nettoyant et en corrigeant les vestiges de leur passé colonial, que les peuples d’occident pourront garantir leurs propres libertés, afin que les mêmes injustices ne se répètent pas chez eux. L’avoir imposé ailleurs, peut devenir l’avoir permis chez soi. Avec les êtres humains, il ne faut pas s’en étonner.

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