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Bereshit : À l’aube du genre humain.

À l’aube du genre humain, alors même que le premier homme commet une erreur que nous payons encore, la torah narre ce fameux affrontement entre deux frères qui se termine par un fratricide. Comment les deux frères en sont-ils arrivés à une situation si catastrophique ? Il s’agit de gens très proches d’Hashem. Comme le souligne le Ramban, nous remarquons qu’Hashem s’adresse à Caïn, ce qui prouve que ce dernier est
prophète ! Qu’est-ce qui le conduit à agir de la sorte ? Plus encore, toujours en partant du fait que Caïn soit prophète, sa façon de répondre à Hashem surprend. Comment peut-il prétendre ignorer où se trouve son frère devant Hashem qui sait tout ? Ce qui intrigue encore plus c’est qu’Hashem feint d’ignorer la réponse puisqu’Il pose la question. D’autant que la formulation de Caïn est surprenante puisqu’il parle au passé en disant « je n’ai pas su » au lieu de dire « je ne sais pas »… .
Pour tenter de comprendre, il nous faut revenir sur la source de la dispute, ce fameux sacrifice qu’Hashem accepte de Hével et refuse de Caïn. Nos sages expliquent qu’Hashem agrée l’offrande parce qu’elle provenait du meilleur de son troupeau, des aînés comme l’indique la torah, tandis que Caïn n’a pas eu la même démarche. Il a opté pour ce qu’il y a de plus bas dans la notion du sacrifice. En effet, le mot sacrifice se dit « קרבן korban ». Comme chacun le sait, chaque lettre de l’alphabet hébreu est un mot à part entière. En ce sens, chaque lettre du mot korban s’écrit ’’קוף kouf’’, ’’ריש rech’’, ’’בית beth ’’ et ’’נון noun’’. Comme le montrent les dernières lettres de chaque mot, la notion la plus basse du mot « קרבן korban », celle qui se trouve à sa limite, est représentée par ces lettres, qui forment le mot « פשתן lin », car c’est cela qu’a apporté Caïn devant le Maître du monde. C’est en ce sens que son sacrifice a été refusé, tandis que celui d’Ével, de par sa noblesse s’est vu agréé. Devant son échec, Caïn s’emporte et Hachem lui explique qu’il n’a qu’à s’améliorer pour voir ses actes pardonnés, et pour surpasser Hével. Au lieu d’en tirer la leçon, Caïn va rendre son frère responsable de son échec. Comme l’expose le Kli Yakar, c’est dans un champs que le meurtre va se faire. Ceci n’est pas anodin mais poursuit un but précis. Caïn, pour dépasser Hével, ne cherche pas à s’améliorer, mais à rabaisser son frère. Dans le récit de la présentation des sacrifices, la torah met en avant un détail sur lequel Caïn est plus méritant que son frère. Il est celui qui innove la notion du sacrifice, il est celui qui en premier cherche à faire une offrande au Maître du monde ! Ce n’est pas l’idée de Hével, bien au contraire. D’ailleurs la torah le reproche à ce dernier, lorsqu’elle précise que « lui aussi » a apporté une offrande, dans le sens où il a copié la démarche de son frère, il a jalousé une démarche qu’il aurait dû avoir de lui-même. C’est pourquoi, c’est dans un lieu reculé, loin de sa famille que Caïn s’en prend à son frère, pour lui exposer sa faiblesse : aux yeux de Caïn, Hével n’agit qu’en fonction des autres, il ne cherche pas à amorcer de lui-même une démarche envers Hachem. Dès lors, dans un lieu éloigné, où plus aucun modèle ne se présente, Hével n’est plus rien. Le Malbim (dans son livre erets ’hemda) va encore plus loin et explique que non seulement Caïn estime que Hével n’a pas de mérite pour le sacrifice qu’il a fait car il n’a fait que plagier son idée, mais pire, il est coupable d’une faute ! L’aîné des deux frères estime même que la raison du refus de son sacrifice n’est autre que la présence de Hével. En effet, comme nous l’avons dit plus haut, le sacrifice de Caïn se base sur le lin qu’il présente à Hashem. À priori, même s’il y avait mieux à apporter, le lin ne présente aucune source négative pour être refoulé de la sorte. Quand bien même Caïn n’a pas eu la générosité de choisir un matériel agricole de qualité comme par exemple des bikourim qui auraient été plus convenables, il n’en demeure que le lin aurait « pu » être accepté par le Maître du monde, du moins au regard de Caïn.
Toutefois, il existe bien une chose qui peut rendre le lin méprisable aux yeux d’Hashem, il s’agit de la laine ! En effet, ces deux tissus, séparément sont tolérés, seulement leur mélange est strictement interdit. Et justement, en offrant son bétail à Hashem, Hével présente la laine en sacrifice, rendant la consommation des deux sacrifices, celui de Caïn et celui de son petit frère, impossible puisqu’il s’agirait alors d’un mélange de lin et de laine ! Il apparaît donc à Caïn, que la raison du refus d’Hachem n’est autre que le blocage qu’opère Hével par son
apport de laine. Il est donc responsable de l’échec de Caïn, qui le premier, voulait apporter un sacrifice à Hachem. Dans cette
optique, Caïn cherche à supprimer son frère, d’une part parce qu’il le juge coupable d’une faute, celle d’avoir empêché un sacrifice, mais aussi parce que cela permettrait la possibilité
d’offrir le lin qui, seul, ne pose aucun problème. Hével apparaît à Caïn comme un poison qui a contaminé son sacrifice ! Il faut
donc se débarrasser de lui. Seulement un problème de taille se pose à Caïn. Comme le précise de Gaon de Vilna, Hével est plus fort que Caïn. Du coup, le risque de voir la situation se retourner contre lui est grand. Cependant, Caïn va tenir un raisonnement impressionnant qui le pousse à prendre le risque. D’après lui, la réflexion qu’il tient est correcte. De fait, il est clair qu’Hachem le soutiendra, il ne prend donc aucun risque par son acte qui ne sera finalement que l’expression de la volonté du Créateur. C’est dans cette optique que le Mayana chel Torah (béréchit, chapitre 4, verset 9) explique la discussion entre Caïn et Hachem. Comme nous l’avions vu, la réponse de Caïn semble folle, il affirme ouvertement être exempt de toute faute, il n’a strictement rien fait de mal : " mon de gardien le je-Suis הֲש ֹמֵר ָחִי ָנ ֹכִי frère ?". L’argument qu’évoque ici Caïn est le suivant : Caïn est clairement conscient qu’Hashem sait qu’Hével est mort. Sa réponse ne consiste pas à nier son meurtre. Il s’agit plutôt de prétendre qu’il n’en est pas coupable. Le seul coupable est Hachem car il est celui qui décide de tout. De sorte que, si Caïn a tué Ével, c’est parce qu’Hachem en avait décidé ainsi. Il n’est donc pas coupable de cela. La responsabilité incombe donc à Hachem ! D’où de gardien le je-Suis הֲש ֹמֵר ָחִי ָנ ֹכִי" : phrase la mon frère ?". Par cela, il insinue que c’est Hashem (et non lui) qui est le gardien de son frère. Dès lors, il n’a pas de compte à rendre à son égard ! En clair, Caïn voit dans la réussite de son désir meurtrier, un acquiescement divin, une preuve qu’Hachem est d’accord avec sa réflexion, sans quoi jamais il ne l’aurait laissé s’en prendre à un innocent. Si Hével meurt, c’est qu’il est passible de mort. Évidemment, Hashem lui répond qu’il est dans l’erreur et que le libre-arbitre est entre ses mains. Ce qui nous pousse à la réflexion suite à ce commentaire, c’est comment Caïn peut-il concevoir les choses de la sorte, alors que son niveau est grand, comme l’a dit le Ramban, il est prophète, il parle à D.ieu ! Dès lors, comment peut-il tenir un raisonnement si léger alors que nous-même serions capable d’entrevoir le libre-arbitre comme un facteur pouvant contredire la volonté d’Hachem ? Un autre point attire notre attention. Il s’avère au final que Hével est bien mort. Or, s’il ne le méritait pas, le libre-arbitre de Caïn n’aurait pas justifié sa mort. Cela signifie que l’argument de Caïn n’est pas totalement faux, Hashem valide bien la mort de Hével. Que s’est-il donc passé ? Le ’Hidouché Harim apporte une explication magistrale sur le sujet. Nous nous étions interrogés sur les réponses que Caïn apportait à Hachem. Pourquoi parle-t-il au passé, en disant « je n’ai pas su ». Plus encore, sur cette réponse de Caïn, Rachi commente « il a agi comme s’il voulait tromper l’esprit de l’être Suprême ». Pense-t-il réellement qu’Hachem ignore ce
qu’il s’est passé ? À cela le ’Hidouché Harim apporte la réponse suivante. L’attitude de Caïn en tuant son frère a diminué l’expression d’Hachem dans le monde. En effet, comme chacun le sait, les dix commandements ont été donnés sur deux tables distinctes contenant respectivement cinq lois chacune. Mutuellement les lois se correspondent une à une, dans le sens où le premier de chaque table trouve écho dans son
homonyme de l’autre table. Dès lors, l’interdiction du meurtre se lie avec le premier commandement des dix « ’ה אנכי Je suis Hashem ton Dieu… », qui est celui de la manifestation du Maître du monde. En ce sens, Hashem explique ici à Caïn, que lorsqu’il a commis le meurtre d’Hével, il a restreint l’expression du divin dans le monde. Ceci est corroboré par la démarche d’Hachem qui agit comme s’Il ignorait ce qui s’est passé, Il pose des questions « Où est ton frère ? » C’est justement ce point qui a échappé à Caïn. Jusque là, la proximité qu’il avait avec Hachem était très grande, très manifeste. Tout ce qui se passe dans le monde est le fruit de l’intervention directe du Créateur. En somme, la mort d’Hével est nécessairement voulue
par Hakadoch Baroukh Hou. Et à juste titre, nos sages abondent dans ce sens, en expliquant qu’Hével a en effet commis une faute passible de mort : il a contemplé la présence divine lorsque celle-ci est venue consumer son sacrifice, chose qu’il n’aurait pas dû faire ! Dès lors, Hachem comptait le retirer du monde, car personne ne peut voir Sa face et vivre. Il est intéressant de noter que plus tard dans l’histoire, cette faute va être répétée par deux illustres personnages : Nadav et Avihou, les deux fils d’Aaron, qui, lors du don de la torah, vont
contempler irrespectueusement la chékhina. Dans ce cas précis, leur mort est connue de tous et s’avère être une intervention directe d’Hachem : un feu céleste les consume durant l’inauguration du michkan ! Elle ne passe pas par un intermédiaire. Dans notre cas également, il se peut fortement, que tel était le projet divin, retirer Hével sans l’intervention de l’homme et manifester par là, l’expression de la volonté Divine. Toutefois, lorsque Caïn intervient, lorsqu’il tue son frère, chose que le libre-arbitre lui permet de faire, puisqu’en effet, Hével est passible de mort, alors, automatiquement, il restreint le commandement homologue au meurtre, celui du « ’ה אנכי Je suis Hashem ton Dieu… », celui où Dieu manifeste Sa présence.
Dès lors, nous comprenons parfaitement l’échange entre Hachem et Caïn. Suite au meurtre d’Hével, Caïn empêche l’intervention divine, il agit « à la place » d’Hachem, marquant une distance avec l’action du Maître du monde. Caïn repousse le premier des dix commandements. Dès lors, il éloigne l’expression du divin. À ce titre, Hachem marque cette distance en feignant d’ignorer ce qui s’est passé, d’où l’utilisation de la question. Face à cette attitude, Caïn ne comprend pas la démarche d’Hachem, celui-ci est sensé être au courant. Plus encore, à ses yeux, c’est bien Hachem qui l’a autorisé à agir puisque tout est la volonté du Maître du monde. C’est lorsqu’Hachem lui explique l’impact de sa faute sur la manifestation divine qu’il dit : « לא de gardien le je-suis, su pas ai’n Je יָדַעְתִי, הֲש ֹמֵר ָחִי ָנ ֹכִי mon frère ? ». En prenant compte de notre développement, cette phrase prend une toute autre tournure. Caïn répond au passé à Hachem, car en effet, il ne savait pas que le meurtre causerait l’éloignement d’Hachem, il pensait avoir raison. Toutefois, Hével était certes passible de mort mais pour un tout autre motif que celui qui motivait Caïn. Et c’est exactement ce que Caïn dit : » ? pas il-savait ne que », su pas ai’n Je וַי ֹאמֶר לא יָדַעְתִי » anokhi du gardien le était frère mon Que הֲש ֹמֵר ָחִי ָנ ֹכִי ( m o t qu i e n t a m e l e p r e m i e r d e s d ix commandements) » ! Caïn s’est complètement égaré en se confortant dans un raisonnement erroné. Ceci est, comme à chaque fois, source de leçon pour nous. Cela nous montre la démarche utilisée par le mauvais penchant pour nous conduire à fauter. Il parvient logiquement à nous expliquer que notre faute est finalement bonne, logique, cohérente, et par ce procédé il nous tente à nous détourner de la vérité. C’est pourquoi chaque acte doit se faire avec beaucoup d’attention, de réflexion, pour s’assurer qu’il s’inscrit bien dans ce qu’Hachem attend de nous. Yéhi ratsone que le Maître du monde nous aide à suivre le chemin de la torah et nous aide à repousser les tentatives permanentes du mauvais penchant pour nous faire fauter, amen vé amen.


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